
(Sud Ouest) Une mission semée d’embûches

Ram Manikkalingam et Fleur Ravensbergen, deux membres de la Commission de vérification, ont présenté vendredi à la presse l’inventaire des armes qu’ETA a mis sous scellé. © Photo photo afp/rafa rivas
Le groupe d’experts engagé dans le désarmement d’ETA était entendu hier par un juge espagnol.
Appelons cela les risques du métier d’expert en désarmement. Hier matin, Ram Manikkalingam, Ronnie Kasrils et Chris Maccabe, trois des six émissaires de la Commission internationale de vérification (CIV), ont été convoqués en tant que témoins devant le tribunal madrilène de l’Audiencia nacional.
Deux jours plus tôt, cette commission convoque la presse à Bilbao pour rendre compte du premier pas de désarmement d’ETA. Un geste inédit dans l’histoire de l’organisation indépendantiste née en pleine dictature franquiste, présenté sous la forme d’un inventaire, suivi de la mise sous scellés d’une petite partie de son arsenal.
p.delobel@sudouest.fr
Le juge Ismael Moreno voulait savoir : où cette rencontre avec deux etarras encagoulés avait eu lieu, qui étaient les deux militants en question et ce qu’ils avaient fait de ces armes. Les représentants de la CIV ont expliqué ne pas avoir reconnu leurs interlocuteurs. Le contact se serait déroulé dans un appartement de Toulouse. Un rendez-vous au terme duquel les membres d’ETA seraient repartis avec leurs matériels mis sous séquestre dans une caisse (lire aussi page 10). Autant d’éléments dont disposaient certainement déjà les services de renseignements, parfaitement au fait des allées et venues de ces « vérificateurs » sur les territoire français et espagnol. Comment interpréter alors une telle convocation ? Les membres de la CIV l’auront probablement prise pour un avertissement. Madrid ne donne aucun crédit à son travail, elle le sait. Mais au-delà de la simple mise en garde, le gouvernement du conservateur Mariano Rajoy a également souhaité calmer la colère de son aile la plus radicale.
Rassurer l’aile dure de la droite
Car à l’origine de cette convocation se trouve l’association des victimes du terrorisme (COVITE). Le collectif, composé de sympathisants de l’extrême droite espagnole et emmené par Consuelo Ordoñez, l’épouse de Gregorio Ordoñez, dirigeant du Parti populaire assassiné par ETA en 1995, a écrit au procureur pour lui demander d’interroger la commission.
L’Audiencia nacional s’est exécutée. Madrid a pris le parti de rassurer sa droite la plus extrême. Quitte à compliquer et jeter un peu plus le discrédit sur la mission de ces experts dont le sérieux est pourtant reconnus au niveau international. Cependant, on imagine mal la justice espagnole mettre en examen les membres de cet organisme. D’autant qu’ils disposent de l’appui de l’ONU et du soutien inconditionnel de la grande majorité des acteurs politiques du Pays basque, y compris du président d’Euskadi, Iñigo Urkullu.