(Mediabask.eus) Le long chemin contre l’impunité

13/04/2015
La session de ce samedi était ouverte au public. © Bob EDME

La session de ce samedi était ouverte au public. © Bob EDME

Les organismes oeuvrant pour la mémoire et la vérité dans différents conflits de l’Etat espagnol se sont retrouvés à la faculté de Bayonne, ce samedi 11 avril.

 

Goizeder Taberna|12/04/2015

Ce n’est pas toujours facile de panser les plaies après un conflit douloureux, « faire la paix requiert effort, union et imagination ». La formule est de Maria Oianguren, représentante du centre d’investigation pour la paix Gernika Gogoratuz, qui l’a prononcée à la conférence sur « Espagne : ONG, mémoire et vérité », le samedi 11 avril au matin, à Bayonne.

Sept membres d’ONG se sont réunis autour de Patrick Pépin, ancien directeur de l’ESJ de Lille et de la rédaction de France Culture, à l’initiative de l’UPPA, l’Institut universitaire de Varennes et l’Association Francophone de Justice Transitionnelle. Cette conférence était l’un des rendez-vous organisés à l’occasion du cycle sur « La violence politique et la justice transitionnelle ». Plus de deux heures de témoignages, le temps de raconter les premières pages d’un livre qui n’est toujours pas terminé.

Que cela concerne le franquisme, le conflit basque ou le droit des personnes vulnérables, comme les immigrés, ces associations mènent un travail contre l’oubli, l’impunité et pour la réparation. « Quand est-ce que se terminera la guerre [celle qui a marqué l’Etat espagnol au XXe siècle] », demandait Patrick Pépin. « Pour certains, lorsqu’ils recevront une indemnisation, ou lorsqu’ils retrouveront les corps de leurs parents, et pour d’autres, la guerre ne se terminera que lorsque la vérité et la justice seront faites vis à vis des morts et de l’histoire de ce pays », a répondu Josu Ibargutxi de l’association Goldatu.

Cette dernière réunit les personnes, emprisonnées, torturées ou exilées, qui ont combattu le franquisme dans les années 60-70. Certains d’entre eux l’ont fait du point de vue de la récupération des droits nationaux du Pays Basque. La loi d’Amnistie de 1977 a permis la libération de ces personnes, mais pour Josu Ibargutxi cette loi a été promulguée dans l’objectif de protéger les franquistes. Il a raconté, en revanche, l’histoire d’un camarade qui a récemment été interpellé pour une affaire qui datait de 1969.

Reconnaissance

« L’impunité » revient dans la bouche de chaque intervenant. Pour sortir de la guerre, Maria Oianguren a opposé d’autres idées : reconnaissance des faits, solidarité envers les victimes et vivre ensemble. Elle s’est souvenue de la lettre envoyée par un président allemand lors du 50e anniversaire du bombardement de Gernika, une lettre de réconciliation.

Pour en arriver là, l’une des voies est la voie judiciaire. Celle que l’Observatoire des Droits humains en Pays Basque, Behatokia, a choisi. Elle oeuvre beaucoup auprès des instances internationales, car dans l’Etat espagnol, « il est difficile de travailler sur quelque chose qui n’est pas reconnu », comme la torture.

Pourtant, « on devrait pouvoir travailler sur la vérité, la justice, la réparation et la garantie de non-répétition de la même manière dans quelque lieu que ce soit. Mais la réalité n’est pas celle-là », déplore Xabier Urmeneta membre de l’association Argituz, « ici [au Pays Basque], on dit que la torture est une invention ». En attendant, on y compte onze morts des suites de mauvais traitements depuis le début du franquisme, la moitié de ces cas concernant la période post-franquiste.

Aucun outil de contrôle

La torture serait inhérente au système pénal, selon Andres Garcia Berrio représentant de la CoPT, Coordination pour la prévention et la dénonciation de la torture : « dans tout système pénal il existe des mauvais traitements ». Le problème s’aggrave, explique-t-il, lorsqu’on ne met en place aucun outil de contrôle.

Témoin de terribles exactions perpétrées par les policiers espagnols sur les migrants à la frontière avec le Maroc, à Melilla, José Palazon de l’association Prodein a dénoncé l’impunité existant aux frontières de l’Espagne, aux frontières de l’Europe. « Melilla est dans une situation de guerre », dans laquelle les immigrants venus d’Afrique ne bénéficient d’aucune protection, d’aucun droits.

 

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